Le livre
Cet ouvrage s’interroge sur la place des femmes dans le rap français, en s’intéressant aux différentes thématiques qui touchent leur condition et émancipation puis en donnant la parole aux actrices de la scène rap, par la mise en lumière de leurs œuvres et parcours. Il est question des pionnières – présentes dès la naissance du genre et invisibilisées au moment de son âge d’or –, des figures incontournables que sont Diam’s, Casey et Keny Arkana, qui représentent chacune une facette différente de la rappeuse, et des héritières, de plus en plus nombreuses, pour lesquelles l’urgence est dans la libération des femmes et se ressent aussi bien dans leurs textes que dans leur attitude. Dans la lignée de Sans fautes de frappe, l’auteure explique ici les spécificités langagières et musicales du rap, fait par des femmes, et démonte les clichés visant à l’extraire d’une culture musicale francophone, en dépit de son indéniable succès populaire.
Les premières lignes
— Madame, vous n'avez pas du tout la tête de quelqu'un qui aime le rap !
Cette remarque m'est souvent faite lorsque j'interviens dans des librairies, des salons du livre ou des bibliothèques pour parler de rap et littérature. Je suis une femme d'une quarantaine d'années, enseignante, blanche, avec un accent étranger qu'on qualifie souvent de « délicieux », mais aussi féministe et je le dis franc et net : j'aime le rap. Ces attributs ne collent pas au portrait-robot de l'auditeur lambda qui lui serait un homme, jeune, issu des banlieues populaires, chômeur, vulgaire, indiscipliné, macho, sexiste...
— En même temps, j'aurais adoré avoir une prof comme vous !
Cette affirmation, souvent assortie à la première remarque, me rassure. Car j'aime et observe de près « ce qui est arrivé de plus intéressant musicalement ces quarante dernières années », comme dit Casey, une rappeuse, la quarantaine elle aussi.
L'auteur
Bettina Ghio est docteur en Littérature et civilisation françaises. Elle est enseignante au lycée et chargée de cours à l’université Paris 3. D’origine argentine, elle s’est intéressée au rap français et a écrit une thèse sur ses liens avec la littérature.